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Lièvres

Lièvres

(reprise d’un article publié le 19/03/2010 sur Naturapics)

Le mois de mars annonce le début d’une période d’activité intense chez les lièvres, c’est le bouquinage, le moment où les hormones dictent leur pouvoir, où les joutes entre mâles sont monnaie courante, où les couples se forment. Voici le récit d’une sortie photo à la rencontre des « grandes oreilles » (comme disait Rahan).

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Cela fait un an que j’attends cela ; l’année dernière, le boulot et la vie familiale ne m’avaient guère laissé le temps de m’y consacrer et la seule sortie que j’avais faite s’était révélée totalement vide de rencontres. Cette année je sens que cela va être bon !
Un ami photographe a fait plusieurs repérages, il a sélectionné pour notre sortie un champ dans lequel il a observé régulièrement plusieurs individus. Rendez-vous est donc pris pour 7h le dimanche matin pour pouvoir bénéficier de la belle lumière annoncée.

Préparatifs

Le samedi soir je prépare mes affaires – il va faire froid, on annonce une température négative avec un vent de 50km/h – gants de laine et sous-gants de soie, cagoule, polaire, chaussettes épaisses, caleçon long … il ne faut rien oublier.
Pour le matériel, j’hésite entre le 300mm et le 500mm, pour finalement prendre le 500 ainsi que le multiplicateur 1.4 car je me dis que nous serons sans doute à une certaine distance de nos sujets. Je vérifie l’état de charge des batteries de mon boitier, j’ai mes cartes mémoires dans mon sac, mon trépied ….. Tout est prêt, je peux fermer.

Récit d’une matinée de mars

7h du matin, me voici au point de rendez-vous. Mon compère ne tarde pas à arriver et nous nous dirigeons vers les champs convoités en suivant un petit chemin agricole sur quelques centaines de mètres. De la voiture, nous apercevons déjà des lièvres au milieu des cultures encore basses. Nous nous garons sur le bas côté en évitant les ornières et nous sortons de la voiture.
En plaine, sans abri ni coupe-vent, nous sentons de suite la morsure du vent du nord-est, température extérieure sous abri -4°C, température ressentie -10°C. Une petite marche de 20 minutes histoire de nous réchauffer et nous voici au bord du champ choisi. Nous bifurquons à 90° et empruntons un large sillon, chemin de passage du tracteur. A peine avons nous fait quelques pas qu’un lièvre bondit à 10m de nous et s’éloigne sans se retourner ; avec le soleil en pleine face, nous ne l’avons pas vu. Il faut vraiment que nous soyons un peu plus attentifs.
Au bout de 200m, nous repérons de nombreuses taches sombres à une centaine de mètres devant nous ; un coup d’œil rapide dans les jumelles nous confirme la présence des lièvres – un groupe compact d’une dizaine d’individus.
Nous décidons de nous installer en espérant que les animaux finiront par s’approcher de nous.
Je ne regrette pas d’avoir pris le convertisseur, les sujets sont pour le moment relativement éloignés.

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Allongés à plat ventre sur la terre gelée, nous subissons rapidement le froid et les courbatures, mais nous persévérons. J’ai remarqué depuis bien longtemps que le photographe de nature faisait preuve d’un certain penchant pour le masochisme 😉
Sur la gauche, 2 lièvres arrivent, ils ne nous ont pas vu et viennent droit sur nous. Allongés derrière nos trépieds réglés à la hauteur minimum, nous tournons lentement vers eux. Ils s’approchent de nous et ma focale de 500mm + convertisseur + coefficient 1.5 du boitier me permet de faire des cadrages assez serrés. La lumière est superbe, il faut en profiter.

Il est assez drôle de constater que le lièvre est totalement myope et ne voit quasiment rien de face par contre son champ de vision s’étend presque sur 180°, c’est pourquoi il n’est pas rare de les voir venir droit vers vous puis de se mettre de profil pour observer.

Comme il faut pivoter prudemment autour du trépied, nous avons du mal à les garder dans le viseur. Les lièvres nous tourneront autour pendant plusieurs minutes et finiront par s’éloigner tranquillement.

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Après cette première séance de shooting, nous reportons notre attention sur le groupe devant nous. Ils sont assez calmes et semblent attendre que le vent tombe un peu, ce qui parait peu probable.
Nous décidons d’un commun accord de tenter de nous rapprocher un peu.
La manœuvre est risquée car nous sommes totalement à découvert, nous laissons nos sacs sur place et commençons une approche longue et éprouvante (pour les genoux, les coudes et le dos), faite de reptations, contorsions et autres mouvements peu habituels au corps humain.
Il faut pousser le matériel devant nous puis ramper, pousser, puis ramper, pousser, puis ramper … Au bout d’une demie heure nous avons péniblement parcouru une vingtaine de mètres. Voyant que les lièvres sont au gîte et peu décidés à bouger, nous nous redressons lentement et tentons maintenant une approche à quatre pattes. Le fond de l’air est toujours aussi froid mais le soleil a fini par réchauffer la terre et les derniers mètres de notre avancée se font non plus sur un sol dur et gelé mais dans une gadoue de plus en plus humide. A plat-ventre, nos vêtements, maintenant recouvert d’une couche de terre grasse, sont parfaitement camouflés, nous en serons quitte pour une bonne lessive.
Je ne sais pas si les lièvres ont fait attention à nous, toujours est-il que dans cette position ils ne nous ont pas considéré comme une menace et nous ont laissé avancer jusqu’à une petite trentaine de mètres.

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Les lièvres commencent à s’agiter ; de temps en temps, l’un d’eux sort de sa léthargie et se met à courir et à faire des bonds, d’autres l’imitent et les joutes se forment.
Encore quelques minutes et le bouquinage bât maintenant son plein, les mâles sollicitent les femelles, celles-ci, vraisemblablement peu réceptives les éconduisent en les « boxant », les prétendants se chamaillent, se poursuivent.

Dès lors, ils ne nous prêtent plus la moindre attention et certains nous approchent jusqu’à ce qu’on ne puisse plus les faire entrer en entier dans le viseur. ……. et d’un seul coup tout s’arrête, juste le temps de reprendre son souffle.

Mais ça y est, les ardeurs sont réveillées et les périodes d’inactivité sont désormais assez courtes.

Nous avons de plus en plus de mal à suivre les sujets dans le viseur et les rafales crépitent ……. Sauf que j’arrive au bout de ma carte mémoire et que mes cartes de rechange sont dans mon sac ……. Que j’ai laissé 100m derrière moi !! Malheur !
Je me dépêche d’effacer la grosse centaine de photos issue de mon précédent affût et que j’avais laissée sur la carte – surtout ne pas perdre trop de temps !
A côté de moi mon camarade s’en donne à cœur joie (il a pensé à mettre ses cartes dans sa poche lui).
Voilà, j’ai fait un peu le vide, je peux reprendre la séance.

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Le groupe, qui devait comprendre plusieurs femelles, se divise ; les lièvres s’égaillent désormais par 2 ou 3, se rejoignent, se séparent. Il y a du mouvement partout autour de nous. Puis, imperceptiblement, ils commencent à s’éloigner.

Nous comprenons que la séance tire à sa fin et malgré notre petite déception de voir ce spectacle se terminer, nous sommes heureux : Heureux d’avoir pu assister à ce comportement et d’avoir été si proche des lièvres. Heureux enfin de pouvoir nous relever et étirer nos grandes carcasses meurtries par ces longues heures allongées.
Nul doute que si mon emploi du temps le permet j’y retournerais. Et si ce n’est pas cette saison, alors ce sera la prochaine.

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Le lièvre en quelques mots

Le lièvre d’Europe (Lepus europaeus) est un petit mammifère herbivore sauvage proche du lapin (Famille des Leporidae, Ordre des Lagomorpha). Il se distingue de ce dernier par ses oreilles plus longues aux extrémités noires, par le dessus de sa queue noire et par son allure générale plus élancée, plus « sportive ». Les lièvres possèdent de longues pattes postérieures, très musclées qui lui permettent de se déplacer à la vitesse de 60 km/h environ et de faire des bonds de 3m.
Les lièvres sont des animaux solitaires qui vivent parfois en couple. La femelle s’appelle la « hase » ; le petit du lièvre s’appelle le « levraut » ; le mâle reproducteur s’appelle un « bouquin », ou « capucin ». La hase a deux ou trois portées par an.

Chez le lièvre d’Europe, la période de reproduction s’étale de mars à novembre. Cette période porte le nom de bouquinage. Il n’est pas rare alors de voir les mâles se faire boxer par des femelles non réceptives. En général, il y a une femelle, un mâle dominant et de nombreux prétendants gravitant autour.

Contrairement au lapin, le lièvre n’habite pas dans un terrier. Il se repose et élève ses petits dans une dépression au sol qu’on appelle gîte.

Quelques références bibliographiques :

– « Guide des mammifères d’Europe, d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient », chez Delachaux et Niestlé
– « Mammifères sauvages d’europe Tome II » de Robert Hainard chez les bons bouquinistes
– « Lièvre » de Michel Bouche et Jean Chevallier aux Editions Hesse

Je tiens à remercier chaleureusement Philippe de Mauroy, mon compagnon lors de cette sortie, pour m’avoir si gentiment permis de profiter de ses observations et de « son » territoire.
Vous pouvez admirer les photos de Philippe sur son portfolio Phototem : Philippe de Mauroy

Voici quelques photos supplémentaires :

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Copyright textes et photographies : Arnaud GRIZARD

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